29/07/2025 francesoir.fr  5min #285646

 Surtaxe des produits européens aux États-Unis : Trump et Von der Leyen annoncent être parvenus à «un accord»

Ue-Usa : Une victoire pour Trump, un désaveu pour Ursula

M.A.

Négociations Trump von der Leyen à Turnberry

SMIALOWSKI AFP

Un accord qui ne satisfait que Donald Trump. Le président américain et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, sont parvenus dimanche 27 juillet à un accord douanier, après des semaines de négociations entre l'UE et les États-Unis, mais surtout une réunion rapide entre les deux dirigeants. Pour le républicain, l'accord est "le plus grand" jamais conclu en matière de commerce. Pour la cheffe de la CE, il s'agit d'un "bon accord". Pour les États membres de l'UE, les critiques pleuvent, visant particulièrement von der Leyen.

Depuis le retour de Donald Trump à la présidence américaine, les négociations ont été menées sous tension, les États-Unis agitant la menace d'une hausse des droits de douane à 30 % sur les produits européens à partir du 1ᵉʳ août afin de renforcer ce que l'UE ou la Chine qualifiait de "protectionnisme". Jusqu'alors, les échanges étaient régis par une moyenne de 4,8 % de droits de douane, les surtaxes successives de 10 % ayant déjà porté le taux effectif proche des 15 % avant l'accord.

Les intérêts de l'UE sacrifiés sur l'autel de la "stabilité" ?

Après un tête-à-tête éclair d'à peine plus d'une heure entre Donald Trump et von der Leyen sur le golf de Turnberry, les deux dirigeants ont scellé un compromis : l'ensemble des exportations européennes vers les États-Unis sera désormais soumis à un taux unique de 15% de droits de douane. En échange, l'Union européenne s'est engagée à acheter 750 milliards de dollars de produits énergétiques américains (principalement du gaz, du pétrole et du nucléaire) et à investir 600 milliards supplémentaires dans l'économie américaine. Certaines filières stratégiques, comme l'aéronautique, les semi-conducteurs ou les matières premières critiques, profiteront d'une levée réciproque des droits de douane.

Ce compromis est présenté par Donald Trump comme "le plus grand jamais conclu en matière de commerce". La patronne de l'exécutif européen a salué un "bon accord", qui apportera de la "stabilité".

Certains ont salué l'accord, considéré comme une manière d'éviter une guerre commerciale ouverte. Telle est la réaction de Friedrich Merz, qui estime que le texte permet d'"éviter une escalade inutile dans les relations commerciales transatlantiques". "Nous avons ainsi pu préserver nos intérêts fondamentaux, même si j'aurais souhaité davantage d'allègements dans le commerce transatlantique", a-t-il réagi. Mais l'industrie automobile de son pays déplore un accord "insuffisant" qui aura des "répercussions négatives considérables".

En Italie, les réactions sont prudentes. Tout en saluant l'accord, Rome attend les détails pour examiner l'accord et se prononcer. Les Irlandais disent "regretter" ce taux de 15% mais se félicitent de la "forme de certitude nécessaire" apportée par l'accord.

Le Premier ministre hongrois, Viktor Orban, n'a pas mâché ses mots. L'avant-veille, lors d'un discours tenu lors d'une université d'été en Transylvanie, il critiquait la direction actuelle de l'UE, notamment ses "faiblesses" face à Washington et son intention d'imposer des droits de douanes supplémentaires. "L'actuelle direction de l'UE sera toujours la dernière à signer des accords avec les États-Unis, et toujours les plus mauvais accords", a-t-il dénoncé.

Lundi, il en a remis une couche. "Il est évident pour moi qu'il ne s'agit pas d'un accord. Ce n'est pas un accord que le président Donald Trump a conclu avec Ursula von der Leyen, c'est Trump qui a mangé von der Leyen au petit-déjeuner. Voilà ce qui s'est passé", a-t-il déclaré, qualifiant Ursula von der Leyen de "poids plume" face au président américain.

Une "vassalisation" de l'UE par une cheffe non élue

En France, les critiques sont toutes aussi virulentes. Certaines remettent quasiment en cause l'appartenance de l'Hexagone à l'Union européenne. Le Premier ministre, François Bayrou, a dit regretter "un jour sombre" pour l'Europe qui "se résout à la soumission" en signant l'accord. "C'est un jour sombre que celui où une alliance de peuples libres, rassemblés pour affirmer leurs valeurs et défendre leurs intérêts, se résout à la soumission", a-t-il écrit sur X.

Marine Le Pen a dénoncé "un fiasco politique, économique et moral". "La Commission a accepté des clauses asymétriques que jamais la France elle-même, gouvernée par un exécutif patriote, n'aurait acceptées. Des centaines de milliards d'euros de gaz, ainsi que des armements, devront être importés chaque année depuis les États-Unis", a-t-elle déclaré, dénonçant une "capitulation en rase campagne pour l'industrie française et pour notre souveraineté énergétique et militaire".

Même son de cloche chez les autres partis de l'opposition. Jean-Luc Mélenchon, chef de file de La France insoumise, a déclaré que "tout a été cédé à Trump". "Droits de douane, obligation d'achat, taxe de 5 % sur le PIB : le libéralisme, la concurrence libre et non faussée et autres règles du traité de Lisbonne sont une mauvaise blague", a-t-il estimé.

Le secrétaire général du Parti sociale, Pierre Jouvet, voit dans cet accord une "vassalisation". "Se satisfaire d'avoir écopé de 'seulement' 15 % de droits de douanes ? Mais ce sont nos emplois, nos productions et l'environnement qu'Ursula von der Leyen a sacrifiés en promettant 600 milliards de dollars d'investissements aux États-Unis et l'achat de gaz naturel liquéfié", a-t-il rappelé.

L'accord de Turnberry accentue le malaise envers une UE jugée incapable de défendre ses intérêts face à Washington. Ursula von der Leyen, qui accumule les scandales au fil des ans et critiquée pour sa faiblesse et son manque de légitimité démocratique, symbolise cette défiance grandissante. Nombreux sont ceux qui remettent en cause l'utilité même de l'Union, perçue comme soumise aux États-Unis.

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